Le Père tranquille et l’expansion du Pyla

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Ch.9 Pyla-sur-Mer, ce n’est plus…
comme avant !

Premier tome : La ville sous les pins, origines et développement
Un livre de Raphaël Vialard (publication limitée – commande par souscription)
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Sica et liaisons interquartiers

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Ch.9 Pyla-sur-Mer, ce n’est plus…
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Premier tome : La ville sous les pins, origines et développement
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 LE PILAT PLAGE 

 Louis Gaume

Le Pyla ne serait pas le Pyla sans la dynastie Gaume, de Louis le grand-père, fondateur des premiers hôtels, à Louis le petit-fils, cinquième Gaume à présider aux destinées de l’entreprise familiale.

Laurent Gaume est sabotier, dans la forêt de Tronçais, marié à Louise Bourdin, qui a des ancêtres charpentiers de bateaux ; ils ont 7 enfants, dont Louis, l’avant dernier, qui naît à Franchesse (Allier) le 21 septembre 1888.

Dans le cadre de son compagnonnage, Louis termine son tour de France. Il débarque à Arcachon, le 25 mars 1912, à la maison Fonquerny Baptiste Fonquerny et Marguerite Duport se sont mariés, en 1904, à Arcachon ; Marguerite tient l’hôtel, alors que Baptiste est plâtrier. restaurant d’ouvriers au coin des rues Jehenne et du Casino.

Louis Gaume s’était lié avec Désir Cazobon lors de la réalisation de la maquette du dôme de Saint-Martin de Tours. Intronisé maître zingueur, il est embauché par la charpenterie Cazobon, cours Tartas : Louis Gaume se marie, le 20 juillet 1912, à Arcachon, avec Marthe Moyzes, de deux ans sa cadette, et jeune sœur d’Alice, l’épouse de Désir Cazobon.

Le père de Marthe est ostréiculteur ; Marthe conservera la maison familiale de la rue de la Mairie prolongée où les jeunes mariés se sont installés.

Louise, naît le 26 avril 1914 ; elle sera championne de France de tennis de table en 1946, 1947, 1948, 1953.

Au métier de zingueur, Louis et Marthe jouent les « Michel Morin », n’hésitant pas à répondre aux nombreux besoins formulés par les clients de passage.

Louis est blessé, le 20 août 1914 et gardé prisonnier à Lechfeld, en Bavière, au sud d’Ausbourg, puis à Dillingen, sur le Danube.

De retour à Arcachon après la guerre, Louis Gaume se met à son compte avec son cousin Laurent Gaume : ils lancent une entreprise générale du bâtiment.

Daniel Meller fait appel à eux pour construire la station balnéaire du Pyla.

Jacques Gaume naît, en 1920, rue de la Mairie prolongée, et Jean, en 1925, 41 rue Lamartine (devenu n°55, et siège de l’entreprise Gaume).

En 1925, l’entreprise Gaume construit le bâtiment de la Banque de France (l’actuelle sous-préfecture).

Louis Gaume crée des sociétés que lui ou des proches contrôlent totalement : la première, l’Immobilière du Sud-Ouest Ayant beaucoup de difficultés à la diriger, elle sera mise en liquidation à partir de 1938. le 1er septembre 1923 ; son idée de génie a été de comprendre qu’il n’existe pas de station balnéaire sans hôtellerie, raconte son petit-fils Louis Gaume. C’est pourquoi il fonde le Bar et Hôtel de la Corniche, les garages de la Côte d’Argent, etc.

Suivant les opportunités, il organise, tout un système de financements croisés, surtout d’échanges fonciers avec la Société Immobilière du Sud-Ouest, la société mère en quelque sorte, qui ne peut pas se passer de lui, homme de terrain Pyla-sur-Mer, Jacques Clémens, 2006..

En 1928, avec le comte Roger de Faramond, originaire du Tarn où il possède le château de Vindrac, Louis Gaume fonde la Société anonyme immobilière dePilat-Plage La Société anonyme immobilière Pilat-Plage ayant son siège à Arcachon, est, à partir du décembre 1927, abonnée au timbre pour 48 350 actions, marron clair sur fond blanc, n° 16651 à 65000, d’une valeur nominale de 100 fr pour lesquelles elle a été dispensée de l’apposition matérielle de l’empreinte du timbre par une décision du directeur de l’enregistrement à Bordeaux en date du 10 décembre 1927. Source JO 22/12/1927.. Cette société a pour administrateurs le comte de Faramond, ingénieur E.C.P., Gaston Lapadu, négociant, Louis Gaume, entrepreneur, Louis-Laurent Gaume, ingénieur, Albert Gaston Desolneux, banquier, Charles Mage, inspecteur des finances, Albert Aulin, ingénieur E.C.P.

Suivra en 1931 la Société anonyme des Garages de la Côte d’Argent. Viendra aussi, la Foncière du Sud-Ouest.

En 1928, l’entreprise Gaume a créé son propre bureau d’études.

Bien sûr, tout n’est pas toujours facile.

Un projet d’hôtel « Carlton » échoue en 1932 à cause de la crise économique ; on croit encore au casino…

En 1932, classée hors-cote, l’Immobilière dePilat-Plage ne donne lieu qu’à de rares transactions à 50% environ au-dessous de son pair qui est de 100 francs. On prête au Conseil l’intention de proposer pour la première fois la distribution d’un dividende Journal des finances du 13 mai 1932..

Quant à La Foncière et Immobilière de Pyla-sur-Mer, de Daniel Meller, elle est vainement offerte à 700 contre 1 195, cours remontant au mois de juin 1931 Journal des Finances du 13 mai 1932..

26 octobre 1934,

Monsieur,

Il m’est impossible de m’absenter en ce moment mais j’espère pouvoir … vous faire connaître ce que j’ai appris au sujet de la bombe qui ne va pas tarder à éclater à Pilat-Plage. […]

H. de Pitray

En 1935, Gaume est au bord de la faillite. L’entreprise emploie alors 200 personnes et a acheté un lotissement difficile à réaménager Valeurs actuelles, 14 mars 2013..

Le 30 janvier 1936, la Société Foncière du Sud-Ouest est dissoute.

S’il est une qualité que l’on se doit de reconnaître à Louis Gaume, c’est la persévérance.

En 1937, Louis Gaume peut dire que son entreprise a construit 90 % des villas de Pyla-sur-Mer et de Pilat-Plage.

Louis Gaume est un bagarreur, même s’il lui arrive parfois de jouer les pleureuses : Comme suite à votre lettre du 29 courant (avril 1939) … je vous prie de bien vouloir ne pas arrêter les travaux car cela m’obligerait à mettre à pied une soixantaine d’hommes environ, ayant à construire, en plus du chantier Jamoneau, deux autres villas l’une pour Monsieur Thomas et l’autre pour Monsieur Dechappe et une quatrième qui est sur le point d’être traitée Correspondent au lotissement Gosselin, boulevard de l’Océan & avenue de la Plage..

Je pense que comme moi, vous comprendrez que dans la période difficile que nous traversons, le moment est peu favorable pour provoquer un arrêt de travail…

Il a toujours soutenu, aidé, sponsorisé les sports, qu’il s’agisse de voile, de golf Le golf dont jouaient excellemment ses trois enfants. de tennis, de rugby… ou, plus simplement, de courses, donnant de l’argent pour des prix.

Louis Gaume meurt en 1962, non sans avoir soigneusement organisé sa succession avec ses deux fils : Jean s’occupe de l’activité hôtelière, et Jacques le remplace à la tête de l’activité immobilière : ce dernier marche dans les pas de son père ; alors que Louis s’est appuyé sur les Rothschild, Jacques aura Yves Lanvin pour soutien financier.

 1928 – Pilat-Plage

Déjà, en 1926, les forêts de M. Daney, près du restaurant Seguin, sont achetées par un consortium dont fait partie M. Gaume D’après L’Avenir d’Arcachon du 9 mai 1926..

Aussitôt formée, la Société anonyme immobilière de Pilat-Plage acquiert un terrain, sis au pied de la dune du Sabloney Jouxtant par le sud-est à la forêt usagère, au sud à M. Debray, à l’ouest au Bassin, à l’est à M. Lacombe ainsi qu’à divers terrains de la Société de Pyla-sur-Mer, enfin à Mme Rolland, née Lesca. 52 hectares provenant de la Société immobilière de Pyla-sur-Mer La Société de Pyla-sur-Mer se réserve 770,50 m² sur lesquels existe une cabane de résinier. Les terrains de Daniel Meller se vendent de 3 à 70 francs le mètre. et 12 hectares dits de « La Pointe du Sud » anciennement à la famille Conseil, que la famille Expert, dernier acheteur, cède au prix de 3 275 000 francs D’après L’Avenir d’Arcachon du 26 mars 1933..

De protégé de Daniel Meller, Louis Gaume se présente alors en concurrent.

Gaume veut un lotissement sans barrière, aucune installation parasitaire gênant la vue des héritages voisins. Un besoin qui se veut ouvert sur un parc, … que l’on refermera, au troisième millénaire, et que l’on cadenasse à la mesure de ses peurs ou de ses instincts.

Louis Gaume entre en relation avec Henri de Rothschild (château Mouton) et son fils Philippe qui l’aident à financer les vastes opérations immobilière dePilat-Plage et hôtelières (Haïtza, Oyana, La Corniche).

Le programme de morcellement est établi le 23 juillet 1928 : 49 ha dont environ 10 ha d’espaces libres ; une vaste zone, située au flanc et au pied de la dune, bien qu’appartenant à la Sté anonyme immobilière de Pilat-Plage, ne sera pas morcelée et restera publique.

L’autorisation préfectorale L’autorisation concerne le lotissement « Partie de la Région du Sablouney » présenté par la Société foncière du Sud-Ouest. du 18 mars 1929, est assujettie à l’installation de lampes électriques à l’intersection de l’avenue de l’Océan et de la voie C, et à l’extrémité de la voie B.

Louis Gaume désire créer une station de bains de mer. Il procède à des travaux de viabilité beaucoup plus perfectionnés qu’on ne le fait dans les sociétés similaires. Outre les bains de mer, il prévoit, au centre même du projet, des immeubles de luxe, des palaces, un casino et des magasins. Il donne naissance à une plage nouvelle, capable de rivaliser avec les plus grandes stations françaises.

La dune qui domine la mer d’une hauteur de 12 à 15 mètres à marée haute, est transformée en terrasse fleurie.

Les voies du lotissement sont tracées comme les allées d’un grand parc, sur le modèle de la Ville d’Hiver d’Arcachon, conçu en relation avec le relief existant qui est utilisé comme ressource et qui est révélé par le tracé courbe de ses rues. Les villas superposées, sur les pentes, laissent la vue libre sur le Bassin pour chacune d’elles Projet d’extension et d’embellissement, Ferdinand Duprat, architecte paysagiste bordelais, 1932. Publié en 1932 dans la revue « Jardins d’aujourd’hui » Comité de l’art des jardins de la société nationale d’horticulture de France, Paris, Studios « Vie à la campagne ». On lui doit la restitution des jardins de l’Hôtel de Ville de Bordeaux, l’ancien palais de Rohan, dans les années 30. Il recrée également, en 1938, les jardins du château de Vayres. À la propriété Arnaga ayant appartenu à Edmond Rostand à Cambo-les-Bains, il coopère au tracé des jardins et du parc avec ses condisciples Tournaire et Ferret. Il participe aux projets des jardins des châteaux des grands vignobles du bordelais : Haut Brion, Beychevelle, Malle (ce dernier n’est pas réalisé). On lui doit aussi le parc de la propriété de Louis-Théodore David, maire et sénateur d’Andernos-les-Bains de 1900 à 1929, qu’il imagine et réalise en 1931. Il se retire en 1960 à l’âge de 73 ans, dans sa résidence à Bruges (propriétés actuelles de Ford et Leclerc). Il est enterré au cimetière communal, dans le caveau de famille qu’un de ses anciens employés continue d’entretenir régulièrement,Mémoire de Bruges, Lucien Gontaud, 2010..

Comme au Moulleau, il est prévu une chapelle, sur la hauteur, …

Ne pouvant pas, par ses propres moyens, procéder à la réalisation de ce programme, Louis Gaume entre en relation avec Henri Ruhl, propriétaire du Casino de Cannes et d’intérêts importants à Cabourg et à Dinard. Sa Société, « l’Immobilière et thermale Créée par Henry Ruhl & Cie et la « Casino Municipal de Cannes Limited », devenue, en 1929, »Société Immobilière et Thermale pour le Développement des Stations Françaises ». « , procède à la constitution d’une filiale, dénommée « Société générale foncière du Sud-Ouest », avec laquelle la Société immobilière de Pilat-Plage passe des accords AGO de la Société immobilière de Pilat-Plage du 7 juillet 1930..

Les travaux sont effectués par Louis Gaume et sa « Société de Pilat-Plage ».

Pilat-Plage se caractérise par ses nombreuses maisons de style « néo-basque ». Avec leurs toits dissymétriques et les faux colombages, leur aspect trapu, les teintes brunes et ocre, elles se fondent dans les pins.

Voici ce qu’en dit, à l’époque, la revue Urbanisme : Notons … la quantité de constructions imitées du type de la maison basque… On peut trouver que là ce type n’est plus en parfaite harmonie avec le paysage, si différent de celui du pays de Ramuntcho Urbanisme : revue mensuelle de l’urbanisme français, 1932..

La ferme labourdine a été érigée en modèle : le type accompli de la ferme labourdine compte trois travées en symétrie. Ce type, commun dans le sud-ouest, a parfois été qualifié de « basilical », par analogie avec les plans d’églises au vaisseau central flanqué de bas-côtés.

Les caractéristiques de cette maison sont :

– deux façades pignons étroites, et deux murs latéraux plus larges ;

– la façade principale, orientée au soleil levant (pour se protéger des intempéries résultant du climat océanique), à pans de bois ; elle peut être agrémentée de balcons en bois, de fenêtres croisées, être ornés d’éléments sculptés en pierre ou en bois (linteaux, arcs, pierres d’angle, tableaux gravés d’épigrammes ou de date) ;

– généralement, sur la façade principale, le lorio, porche d’entrée profond visible sur beaucoup de fermes labourdines. Plus large que les travées, au plancher généralement surélevé, le lorio permet de travailler à la lumière sans craindre les intempéries ; il dessert l’eskaratz, à la fois entrée principale, espace de distribution et remise. Logiquement les humains habitent la travée sud, l’extension nord étant utilisée à des fins agricoles.

– les colombages Du latin columna, colonne, dont la prononciation populaire a transformé le n en b ; le /b/ épenthétique est lié à la difficulté de prononciation du groupe /mn/ du latin classique, attesté sous la forme columbe en 1080. en bois – il est à remarquer que le colombage ne comporte pas d’écharpes (pièces de bois placées en diagonale) -, une porte d’entrée très travaillée souvent rehaussée d’un linteau ;

– des murs blanchis à la chaux et des menuiseries aux couleurs rouge « sang de bœuf » ou vert, ces couleurs étant les plus faciles à obtenir ;

La faible pente des toitures de tuiles creuses offre une réelle souplesse en permettant d’agrandir le corps central par extensions latérales : au cours du temps et en fonction des besoins, le volume initial peut être rehaussé d’un niveau occupé par des chambres, surmonté d’un grenier pris dans la pente du toit, ou, sur terrain peu accidenté, se prolonger de part et d’autre des longs pans, en lui donnant un aspect dissymétrique.

C’est ainsi que des fermes qui nous paraissent aujourd’hui des modèles d’équilibre esthétique peuvent être le résultat de différentes campagnes de travaux, fruit des efforts de plusieurs générations.

Arnaga, à Cambo, est un des premiers modèles du style néo-basque.

Si l’apparition du style néo-basque remonte à l’extrême fin du XIXe siècle, avec la construction, en 1896, de la villa Toki-Ederra, à Biarritz, sa diffusion à Pyla-sur-Mer et plus généralement sur le Bassin d’Arcachon ne semble pas antérieure à l’entre-deux-guerres. S’inscrivant dans une tendance plus générale visant à mettre à l’honneur, à la même époque, des formes à forte identité régionale (styles néo-flamand, néo-normand, néo-provençal…), l’architecture néo-basque apporte vers 1930 un souffle nouveau au modèle du chalet en dur, en y introduisant un vocabulaire décoratif à tendance rustique ainsi que des matériaux traditionnels comme la tuile canal. Diffusé comme il se doit par les périodiques consacrés à l’architecture, le modèle du chalet néo-basque a connu un succès qui s’explique par le fait qu’il permet une plus grande liberté distributive que ses lointains ancêtres. En effet, il n’est pas contraint, comme le chalet en dur, par l’obligatoire toiture à deux versants égaux. Non seulement les deux versants sont le plus souvent inégaux mais, mieux encore, la villa néo-basque s’autorise des décrochements en façade (que ne connaît pas la ferme labourdine dont elle est issue), donnant ainsi naissance à des avant-corps ou à des arrière-corps qui permettent une grande liberté de plan. Si l’on ajoute à cela l’adoption du colombage, induisant une gamme chromatique renouvelée qu’accompagne souvent une multitude de détails dus au talent du menuisier, on comprend aisément que Pyla-sur-Mer ait accepté de se mettre à l’heure basque, durant les Années folles?!

Les constructions néo-basques ont des façades ordonnancées. Le mur pignon, traditionnellement sur les petits côtés de la métairie, passe pour des raisons esthétiques sur les grands côtés de la villa ; se produit alors ce que l’on nomme « le retournement de façade ». En inversant l’axe de la maison, on obtient deux larges façades principales  ouvertes pour capter la lumière essentielle au bien-être. La maison, moins profonde, est inondée de lumière.

La fréquente dissymétrie, l’un des pans de la toiture étant plus long que l’autre (ce n’était pas une règle traditionnelle mais cela résultait souvent d’un agrandissement de la maison), donne une silhouette caractéristique à la villa.

Sont aussi présentes les tuiles rouges à emboîtement et de nombreux éléments de décor : pans de bois, corbeaux, consoles de bois sous avant-toit, des garde-corps ou des balcons de bois, etc. ; les colombages colorés qui structurent le haut des deux pignons (dans la ferme labourdine, seul le pignon Est, abrité de la pluie, en comportait) ; les volets en bois (les volets battants sont en bois ; pour les grandes ouvertures, les volets roulants sont placés à l’intérieur du mur, et sont de même teinte foncée que les volets battants) et les jardinières de fleurs de la même couleur que les colombages ; la simulation des ouvertures triangulaires qui permettaient d’aérer le foin placé dans le grenier de la métairie.

Les ouvertures sont nombreuses, parfois arrondies.

L’état d’esprit voulu par Louis Gaume réside dans la réalisation de maisons discrètes ouvertes sur de grands parcs arborés. Le paysage forestier tient donc une place importante dans ces quartiers.

En 1929, les lots 242, 250 et 252 sont achetés par Jeanne Lanvin qui fait construire deux villas jumelles (Ferdea-Churria & Gorria-Churria), et le lot 244 par Maurice Gaumont qui fait construire la villa Soledad  En 1954, un courrier relatif à la propreté de la plage fait état de la Comtesse de Chauvigny, villa « Soledad »..

Suite à un coup de foudre, le comte Marie Ernest Paul Boniface de Castellane, ex-gendre Comte Marie Ernest Paul Boniface, dit Boni de Castellane (la prononciation est Caslane en omettant le te du milieu) (1867-1932), issu d’une maison de Provence fort ancienne et glorieuse, se marie le 4 mars 1895 à Anna Gould (1875-1961) ; La nouvelle comtesse de Castellane est fort laide, petite, légèrement bossue, ce qui fait dire aux mondains de l’époque : « Elle est plus belle, vue de dot ! ». Ils ont quatre enfants, Marie-Louise (1896) morte en bas âge ; Boniface (1897-1946) ; Georges (1898-1944) ; Jason (1902-1956). Son épouse, dont il présentait la chambre avec un ton de guide de musée sous les commentaires du type : « Voilà le revers de la médaille »… ou pire « Voilà la chapelle expiatoire », se lasse des frasques de son mari volage autant que de ses dépenses immodérées ; elle demande et obtient le divorce en 1906. L’annulation du mariage à la Sacrée Rote de Rome sera obtenue en 1924. Anna Gould se remarie avec un cousin de Boni (par sa grand-mère, Pauline de Talleyrand-Périgord), Hélie de Talleyrand Périgord, prince de Sagan, dont elle a deux enfants : Howard (1909-1929) ; Helen-Violette (1915-2003). du célèbre milliardaire Jay Gould, propriétaire de la « Western Union Telegraph Company », achète, la même année, huit mille mètres carrés de terrains, avec l’intention de construire un véritable palais à côté de celui de Mme Dupuy, du « Petit Parisien », et non loin du Palace et du Casino dont on attend le début des travaux L’Avenir d’Arcachon du 5 octobre 1930..

En 1930, Guy de Pierrefeux, nous dit  L’Avenir d’Arcachon du 21 septembre 1930. que c’est surtout le Pyla et Pilat qui excitent l’humeur maladive des détracteurs, souvent intéressés. Ceux-ci n’ayant pas réalisé des bénéfices à l’époque où ils pouvaient en faire en achetant à bon marché des terrains qui se vendent maintenant très cher, vont répétant : « Un Casino ? Un palace ? Ça ne prendra jamais ! Du reste on a dû faire venir des figurants de théâtre pour meubler l’hôtel de Pilat-Plage. On vous a dit qu’il y avait en août des comtes ; ce n’étaient que des contes. On a payé des gens pour habiter les villas. Gaume est à bout et il congédie chaque jour des centaines d’ouvriers. Et pendant ce temps-là, les matériaux du casino et du palace encombrent la gare. Le directeur, M. Rulls, qui a l’habitude, de conduire des affaires semblables au succès, dresse ses plans pour la prochaine saison, on trace partout de nouvelles routes et si celle de Pyla à La-Teste n’a pas encore été inaugurée, c’est que la commune de La-Teste veut qu’elle soit goudronnée avant de la livrer au public.

L’hôtel Pylat (sic), où il y a encore beaucoup à faire, a refusé du monde cet été, comme du reste celui du Moulleau, et les villas se sont louées 55 mille francs pour un mois comme celle de M. Lapadu ou 70 mille francs pour trois mois comme celle de M. Moxey. Il serait fastidieux de redire les noms des grands financiers et des littérateurs parisiens qui ont adopté le Pyla et le Pilat.

L’entrepreneur Gaume cherche des ouvriers un peu partout pour remplacer les italiens que la loi l’a forcé à congédier pour les envoyer aux travaux des moissons pour lesquels le permis de séjour leur avait été accordé.

Cet hiver, outre la Société Générale à Arcachon, la belle villa de M. Chaumet, le grand joaillier parisien à Moulleau, il va avoir à construire à Pyla-sur-Mer et à Pilat-Plage de nombreuses villas dont celle de M. James de Rothschild qui coûtera plusieurs millions. Les villes et les entrepreneurs que tuent les défaitistes touristiques m’ont l’air de se porter admirablement bien.

Prévoyant, l’ami Gaume achète la cabane forestière du Petit Pissens et les forêts qui l’entourent L’Avenir d’Arcachon du 22 mars 1931..

Avec l’action de M. Bolognini M. Bolognini est président du comité des fêtes Moulleau-Pyla. En 1932, Officier d’Académie, J.O. du 7 avril 1932., un palace, un casino, une église, un garage, des jardins et des jetées vont se construire à Pilat-Plage L’Avenir d’Arcachon du 29 mars 1931..

En 1931, Louis Gaume est récompensé d’avoir prêté un concours désintéressé aux organisateurs du tir aux pigeons, il a vendu une grande quantité de terrains à Pilat-Plage : la grande couturière et modiste Mme Mathieu Levy, née Juliette Suzanne Talbot, en a acheté pour 400 000 francs, et doit y installer des magasins de vente avec défilé de ses mannequins L’Avenir d’Arcachon du 19 avril 1931..

Le « black thursday » de 1929 n’empêche pas la vogue de Pilat-Plage : sept cent cinquante mille francs de terrains sont vendus du 1er au 15 juillet 1931.

En 1933, l’administration préfectorale fait procéder à un récolement des travaux d’aménagement du lotissement de Pilat-Plage D’après L’Avenir d’Arcachon du 26 octobre 1933..

Toujours entre mer et forêt, la Société de « Pilat-Plage » a, en six ans, réalisé une œuvre colossale et dont les possibilités sont infinies.

Administrateur-Délégué de la Société Immobilière, M. Louis Gaume a fait, tel un magicien, surgir de ces dunes incultes, au sol favorable à la seule poussée des grands pins, des villas et des villas, toutes du plus séduisant confort et entre lesquelles un choix raisonné paraîtrait difficile.

Et, depuis six ans, l’extension de Pilat-Plage va progressant. La voie côtoyant l’Océan et qui bientôt, on doit l’espérer, se muera en « Boulevard Maritime », chaque jour s’allonge et instantanément se pare de chalets posés dans la verdure et les fleurs !

Pour démontrer la foi que les Administrateurs de Pilat-Plage ont en l’avenir de la jeune station, notons qu’après l’avoir dotée d’Hôtels du tout dernier modernisme, de garages etc. ils ont, en bordure de l’Océan, au pied de la grande Dune de Pilat, entrepris la construction d’un grand Casino Palace dont l’architecte Siclis, auteur du Théâtre Pigalle, a dressé les plans et surveille l’exécution Article de J.-J. A. Gilabert, Guide touristique et historique du Bassin d’Arcachon, 1933..

En 1934, on recense les 10 premiers acheteurs à Pilat-Plage Courrier, du 7 mai 1934, de la Sté anonyme de Pilat-Plage à M. le Maire de La-Teste. :

Mme Renée Dreyfus, 29, rue Octave Feuillet à Paris ;

M. Maurice Gaumont, 22, Faubourg Saint-Honoré à Paris ;

M. René Bernier, 6, rue du Fourneau à Fourmies (Nord) ;

Mme Jane Lanvin, 22 Faubourg Saint-Honoré à Paris ;

M. Canton, Villa l’Ermitage à Pyla sur Mer ;

M. Charles Teste, 11, rue Charcot à Neuilly sur Seine ;

M. Berger, villa Rose des sables, avenue Nelly Deganne à Arcachon ;

M. Livet, 2, rue Nélaton à Paris ;

Mme Davesne, 90, boulevard Maurice Barbès à Neuilly-sur-Seine ;

M. Maltot, 37, rue de Vincennes à Montreuil-sous-Bois.

Le 30 août 1935, le Préfet suspend la vente des terrains du lotissement « Région du Sabloney » ; le 17 septembre 1935, puis le 30 novembre 1936 l’autorisation sera renouvelée.

Lors du récolement des travaux d’aménagement du lotissement le 1er octobre 1938, il est constaté que l’espace libre situé au carrefour du boulevard de l’Océan et de l’avenue D (terrains sur lequel est situé le Casino en construction) a été supprimé Courrier de la Sté Pilat-Plage au maire, du 21 août 1939. Cet espace de 2 065 m² était prévu au programme d’aménagement. .

En 1941, la Sté anonyme immobilière de Pilat-Plage projette la création de 4 courts de tennis.

 Propreté de la plage

Recommandée

Pilat-Plage le 5 août 1954

Monsieur le Maire de La-Teste,[…]

En notre qualité de contribuables de la Commune de La-Teste, nous avons l’honneur d’attirer votre attention sur l’état d’abandon dans lequel se trouve actuellement Pilat-Plage où nous sommes propriétaires.

[…] toute personne non prévenue peut, à bon endroit, se demander s’il n’y a pas, à l’origine de l’état misérable de cette station, une volonté arrêtée de la faire passer dans la dernière catégorie des plages de notre côte, alors que les charges fiscales que nous assumons demeurent parmi les plus lourdes. Vous savez sans doute, que les accès à la plage, notamment par le Carrefour d’Haïtza, sont devenus presque impraticables.

Pour refaire les perrés, détériorés par la tempête, l’entreprise qui en était chargée […] a très exactement attendu l’époque des vacances pour, en fait, manifester son activité en encombrant le passage de constructions en planches, de tas de sables et de moellons, et d’un matériel aussi volumineux que disgracieux. […]

Quant aux autres accès à la plage, ils sont, eux aussi, en très mauvais état d’entretien. L’escalier de la Corniche reste détruit, les pasages, situés auprès des villas Alabaïna et Annabella sont effondrés. Quant à l’allée qui prolonge l’avenue Jean-Mermoz, elle sert, sur le bord de la mer, de déversoir aux tombereaux municipaux, dans les rares occasions où ceux-ci veulent bien se manifester.

Sur la plage elle-même, il apparaissait simple que, par un accord entre vos services et ceux des Ponts et chaussées, les épis en ciment qui ont été édifiés pour faire remonter le sable (ce qui ne s’est d’ailleurs pas produit), soient pourvus à leur extrémité de marches d’escalier, permettant un passage sans danger aux enfants et aux vieillards de telle manière que la foule des personnes qui va sur la plage, ne soit pas obligatoirement parquée sur une distance de cent mètres, traversée d’ailleurs par un égout nauséabond. Bien que cet égout soit désaffecté, il déverse encore des eaux polluées, en particulier les jours de forte pluie.

Vous savez sans doute mieux que nous, Monsieur le Maire en votre qualité de médecin Il s’agit du docteur Aristide Ichard, maire de 1950 à 1977., les dangers de contagion que cela présente, sans que nous ayons à insister sur ce point.

Que dire, d’autre part, de l’état de saleté repoussante dans lequel se trouvent les différentes avenues, jonchées de papiers gras et de détritus qui ne sont jamais enlevés et qui donnent à cette station dite de luxe, en raison sans doute des impositions que nous sommes appelés à verser, un aspect repoussant. Il est d’ailleurs curieux de constater, par comparaison, le traitement de faveur et l’entretien remarquable d’une certaine partie de Pyla-sur-Mer.

Des bruits malveillants se répandent, et il est dit assez couramment que, s’il en est ainsi, c’est en raison des intérêts qu’un membre de votre Conseil municipal possèderait dans cette partie de la Commune.

Bien sûr, nous ne voulons pas le croire, mais le contraire nous sera péremptoirement démontré le jour où le Pilat-Plage sera décemment entretenu.

Nous souhaitons, Monsieur le Maire, que vous daignez nous donner, dans un bref délai, les apaisements nécessaires.

Nous ne vous cachons pas d’ailleurs que nous envisageons dans le courant de la saison et au surplus à très bref délai, de donner aux réclamations que nous venons de formuler, toute la publicité nécessaire, afin de grouper les intéressés qui pourront ainsi, plus utilement, se défendre sur le plan légal.

[…]

Veuillez agréer, Monsieur le Maire, ,[…]

Paul Jaubert Signataires : Paul Jaubert Cante l’Aouset, avenue Eskualduna ; Biro, « Donata Baïta » ; villa Amentza ; L’Air du Temps ; L’Esperou, Mme Bigogne ; Dr Dumas Cinderilla ; Richard Roullet, villa La Soizière ; Leglise, V. Veremos ; Capoum Baïta ; Villa Pandagia ; Gorria Chirria ; Baatzia Lezia ; Dr Thuillat, villa Atherbia ; A. Fallot et Dr Fallot, villa Les Ludes ; L. Stark, villa Marina ; Olivier, villa Messidor ; Comtesse de Chauvigny, villa Soledad ; Dabat, villa Oyau Aldia ; villa Lachéguia ; Villa l’Ondine ; Hourren Etchéa ; Mami Baïta ; Etche Otsa ; Villa Aïnhara Homery ; Nick Baïta ; Flor-Africa ; Magasin Mirabelle ; Teurlay « Les Pins » ; Villa Dénito ; Eva Baïta ; Villa Georges ; Meoule Hubert ; Villa Bethi Argui ; Boussac ; Subran ; Maboul « Geo Baïta » ; Villege « Amatchi » ; Legathe « Juana » ; Dr Sol « Laraskéna » ; B. Thomas Villa Françoise ; Villa Bernard ; Etche Bakéa ; Caveau Bordelais.

On peut lire dans l’Auto-journal du 1er octobre 1956 : Avez-vous remarqué la saleté de la plage devant « Les Brisants ». Alors que les municipalités donnent l’exemple en faisant enlever les varechs, il est inadmissible que les hôtels dits « de luxe » laissent traîner toutes sortes d’épaves devant le pied de leurs escaliers.

 Concession de la plage

Le 7 février 1937, l’Assemblée générale de l’association syndicale des propriétaires de terrains de « Pilat-Plage » est convoquée Annonce parue au Journal Officiel du 22 janvier 1937..

L’article 7 du cahier des charges prévoit que la société gèrera les Bains. Aussi, dès novembre 1937, l’association réitère sa requête de 1933 et demande la concession de la plage au droit du terrain qu’elle se propose de mettre en valeur.

En 1938, la municipalité demande au service maritime dans quelles conditions elle pourrait louer la plage pour la sous-louer ensuite à toute personne ou tout organisme offrant les garanties nécessaires.

Ce n’est qu’en juillet 1939 que les conditions du bail sont connues : le prix annuel est de 600 F pour 800 m de plage.

Le 22 juillet 1939, la société Pilat-Plage souhaite céder à la commune un terrain de 20 x 20 en bordure de la plage, face à l’ancienne place publique, afin d’implanter des cabines de bain, qu’il y a lieu de prévoir à 10 mètres en retrait du perré.

C’est néanmoins la commune qui prend à sa charge, pour 20 000 francs, la construction des cabines de bain et WC de la station.

 L’Autostrade

Un « Comité d’Initiative pour la construction d’un boulevard d’Arcachon à Biarritz » se crée en 1905 ; Maurice Martin Né et mort à Bordeaux (1861-1941). Initialement employé d’une grande maison de négoce en vin, Maurice Martin se tourne vers le journalisme et se passionne rapidement pour les sports : cyclisme (il est un des fondateurs en 1891 de la course Bordeaux – Paris), rugby, automobile et aviation, pour le compte de la Petite Gironde, un quotidien sportif, de L’Illustration, et surtout pour la Revue du Touring Club de France. s’attela à ce projet.

L’idée est heureuse ; elle devait s’imposer. La route projetée n’y sera qu’un fil, un mince petit fil perdu dans le pignadà, ayant Arcachon à un bout, Biarritz à l’autre. On y fera de la vitesse tant qu’on voudra ; de l’étape aussi, de la charmante, vivifiante étape, voire du camping. On dit que la route profanera des solitudes, et que le bruit des teufs-teufs empêchera les cigales de chanter. Mais rien n’est dangereux pour les solitudes comme un respect excessif.

Quelques belles stations de luxe, sur un littoral magnifique, rendront, à ce point de vue, de grands services, et ces stations seront la conséquence inévitable d’une route automobile. Ouvrez-la donc, large, belle ; que le Pactole y coule, et que le vieux Landais voie ce nouveau prodige sur une terre fertile en miracles La côte d’Argent : partie méridionale. D’Arcachon à Biarritz. Sur le littoral de Gascogne, Maurice Martin, 1906..

Environ 160 sans-emploi sont recrutés ; les non chômeurs ne peuvent être que dans le personnel de maîtrise.

Tandis que l’on travaille activement au tronçon nord de la future route de Biarritz, la première partie du tronçon sud est commencée à Mimizan sur les mêmes bases (la route aura 6 mètres de largeur avec des accotements de 2 mètres) Albert de Ricaudy..

Maurice Martin, qui ne doute de rien, imagine de construire une route sur le sommet des dunes, en bordure de l’océan, reliant Arcachon à Biarritz, détruisant d’un seul coup 200 km de côte sauvage. Il en dessine le plan.

Pour valider son intuition, avec le « Comité d’Initiative du Boulevard Arcachon-Biarritz », en mars et octobre 1905, deux caravanes vont reconnaître le tracé de la route et traverser les contrées sauvages qui séparent les deux stations balnéaires.

Lors de l’expédition, du lundi 20 mars 1905, devant le conduire d’Arcachon à Biarritz, la caravane quittant le Grand Hôtel du Moulleau, Maurice Martin raconte que la fameuse voie moderne commencera exactement à l’endroit où le sable lui-même a commencé il y a quelques instants, au point terminus de la route macadamisée de Bordeaux-Arcachon-Moulleau. Le projet y comporte un immense parc d’accès, et la voie spéciale y formera une grande boucle. Il y en aura une également à l’autre extrémité, sur les bords de l’Adour, en aval de Bayonne, pour permettre, dans certains cas, un circuit sans fin, avec deux voies de six mètres, l’une montante, l’autre descendante, et, sur un des côtés, en dedans des clôtures, mais séparée pourtant de la voie des automobiles, une troisième petite voie de 1 m 50 à 2 mètres, à péage comme les deux autres, réservée aux cycles et motocycles.

Presque constamment le boulevard suivra la côte à environ 400 ou 500 mètres du rivage, derrière la grande dune. Il sera ainsi protégé par elle contre les fortes intempéries, en pleine forêt domaniale, son tracé passant le plus souvent vers la limite des deux zones forestières dites « de protection » et « de végétation » La côte d’Argent : partie méridionale. D’Arcachon à Biarritz. Sur le littoral de Gascogne, Maurice Martin, 1906..

C’est un véritable corps expéditionnaire qui se lance depuis le Moulleau, sur les chemins sablonneux à l’assaut des étendues de pins. Il est organisé sous la forme d’une caravane de chevaux et de onze « charrettes muletières, des bros, faites spécialement pour voyager dans les sables », conduites par « des conducteurs au type accentué », qui vont accompagner les 17 hommes, qui feront le parcours complet, et les 15 qui ne le feront que partiellement.

Ce sont des journalistes, sportifs, scientifiques et des notables, dont le conservateur des Eaux et Forêts de Bordeaux, et des représentants de l’Automobile Club de France, ainsi que d’excellents photographes : Branger (Photo-Presse, de Paris), Simons et Jean Clair-Guyot, de Paris, Panajou frères et Franck Terpereau, de Bordeaux.

Il ne manquera pas de thuriféraires, dont « les écrivains belges » J. H. Rosny, pseudonyme des deux frères, Joseph Henri Honoré et Séraphin Justin François Boex, dont la préface au livre de Maurice Martin « La Côte d’Argent » est un petit chef d’œuvre de morgue et de mépris pour « le vieux Landais ».

C’est à l’hôtel Lespès de Mimizan-les-Bains que Maurice Martin soumet l’idée de rebaptiser les rivages du Pays de Born, « Côte d’Argent », expression inspirée des reflets argentés de l’océan, et qui s’étendra à tout le littoral aquitain, de Royan La partie charentaise de la Côte d’Argent a été rebaptisée Côte de Beauté en 1930. à Hendaye.

Une plaque sur la façade de l’hôtel Lespès cite les vers du poète :

C’est là que jadis contemplant ce rivage,

Séduit par les reflets du flot toujours changeant,

Pour la première fois j’ai vu la Côte d’Argent.

En 1925, le sujet revient à la mode après l’accord entre les départements de la Gironde et des Landes pour la création d’une route prolongeant la route Arcachon-Moulleau par le Pilat, Cazaux, Sanguinet, Parentis et Liposthey D’après L’Avenir d’Arcachon du 19 juillet 1925..

À Liposthey, un panneau très visible indiquerait :  » La Mer, Pyla-Arcachon-La-Teste, 40 Kilomètres ». Puissent nos compatriotes, puissent les diverses communes intéressées, puissent les Pouvoirs Publics comprendre toute l’importance d’une telle œuvre et unir leurs efforts pour en assurer la réalisation Route Bordeaux-Biarritz par Arcachon, Pyla, Sanguinet, E. Langlet, L’Avenir d’Arcachon du 21 mars 1926..

En 1927, la ville de Biscarosse vient de créer une route entre le bourg et l’Océan ; la municipalité offre de la prolonger pour rejoindre celle que M. Debray créerait sur ses terrains des Gaillouneys. La société de Pyla-sur-Mer ne demanderait pas mieux que de prolonger son avance jusqu’aux Gaillouneys et on aurait ainsi une magnifique promenade sur le bord de la mer et du Bassin, depuis les Abatilles jusqu’à Biscarosse. Ce serait une amorce pour la fameuse route de Biarritz, dont on parle depuis si longtemps. Il y a paraît-il un obstacle pour que soit établi la route de Pyla à Biscarosse : il faudrait traverser deux kilomètres de forêt usagère ; le maire de La-Teste, qui veille jalousement aux droits des usagers, émet quelques objections L’Avenir d’Arcachon du 17 juillet 1927..

En 1929, on annonce que la route qui reliera Biarritz, en passant par Pyla et Pilat, va être faite D’après L’Avenir d’Arcachon du 25 août 1929..

En 1930, on fait une route sur la grande dune et on parle de la percer au moyen d’un viaduc qui établirait la jonction entre le Pyla et Gaillouneys où M. Debray possède des terrains achetés deux sous le mètre et qu’on est en train de revendre 30 francs L’Avenir d’Arcachon du 11 mai 1930..

Une route au sommet de la grande dune, c’est aussi impossible qu’un chemin de fer dans la lune : les personnes, qui disent cela ne connaissent pas Gaume qui va entreprendre les travaux ; ceux qui le connaissent savent que rien ne lui est impossible. Je ne suis pas si certain que cela que nous n’ayons pas un jour un chemin de fer dans la lune, mais je sais bien que le projet de la route sur la grande dune n’est pas dans la lune.

Une équipe d’habitants de Biscarosse va débarquer ces jours-ci, à Pilat, pour appliquer chez nous le système qui leur a si bien réussi pour la fixation de leurs dunes océaniques.

On va planter des herbes résistantes qui fixeront la dune, qu’on ne pourra plus gravir pendant l’ensemencement et la période de croissance, et ensuite on construira cette route aérienne à la grande joie des podagres, mais au grand mécontentement des excursionnistes qui, après avoir gravi à pied la grande dune finissaient par croire qu’ils avaient fait l’ascension du Mont-Blanc Article de Guy de Pierrefeux dans L’Avenir d’Arcachon du 2 novembre 1930..

En 1931, une société au capital de 130 millions se crée pour construire une autostrade. La Royal-Dutch Aussi connue sous le nom de Shell. passe un traité de 15 ans avec la nouvelle société. Elle donnera deux millions par an pour avoir le monopole de la vente des huiles. L’État donne 300 mètres en largeur des forêts domaniales. Sept autos pourront marcher de front sur cette autostrade comme il en existe en Italie. Chaque auto paiera cinquante francs de Biarritz à Pilat.

[…] La Société de l’autostrade vient d’être constituée et c’est de la bouche d’un de ses administrateurs, qui réside en ce moment à l’hôtel Haïtza […], que nous avons reçu confirmation L’Avenir d’Arcachon du 16 août 1931..

Une spéculation sur les terrains de la côte d’Ondres mit l’Administration forestière en émoi ; elle y fit opposition : au point de vue de la desserte des forêts, l’autostrade envisagée ne serait d’aucune utilité, elle disloquerait dangereusement les massifs et, au point de vue touristique, elle serait nettement désavantageuse. Plusieurs maires des communes du littoral s’y opposèrent et notamment M. Courtiau, de Moliets, qui déclara ne pas vouloir qu’on « meurtrisse inutilement » la région littorale landaise, qui dut être laissée « à l’abri des agissements frénétiques de la civilisation ». Il signala que, construite en pleine forêt ou dans la lette littorale, la voie envisagée serait en contrebas, sans vue ni sur la mer, ni sur le pays, et que la traversée des courants de Mimizan, Contis, Huchet, etc., par de larges ponts leur enlèverait leur charme si spécial.

Derechef, le projet fut abandonné. Maurice Martin reconnut lui-même qu’il constituait un « dangereux mirage » et qu’on devait s’en tenir à une route Arcachon-Biscarrosse Histoire des dunes maritimes de la Gascogne, Pierre Buffault, 1942. .

En 1934, l’examen du plan que vient de publier André Rebsomen vous convaincra à première vue de l’urgente nécessité de débloquer le cul-de-sac ou impasse de Pilat-Plage par deux routes :

1° – l’une le reliant droit à La-Teste par les cabanes Méran, Daunesse et Castaing (il faudra attendre la décennie 1990 pour voir réalisée la « Bretelle océane ») ;

2° – l’autre poussant le long de la Plage jusqu’à Biscarosse L’Avenir d’Arcachon du 24 août 1934..

Des voix s’élèvent : détruire le principal attrait d’un site sous prétexte de le rendre plus accessible est une opération que l’intérêt bien compris des communes, tout autant que les exigences des amis de la nature, condamne. Aussi le projet d’autostrade côtière ne supporte-t-il même pas la critique. Et la route qui a été proposée entre le Pyla-sur-Mer et Biscarrosse ne priveraient-elles pas ici le littoral de ce qui lui reste encore de charme La Terre et la vie : revue d’histoire naturelle, 1931. ?

En 1937, Paule Hutzler part d’Arcachon à bicyclette ; elle choisit le circuit des Lacs. Elle apprend de la bouche de l’aubergiste qu’il est un chemin de ciment qui de la Dune du Pilat va jusqu’à Léon, au milieu des pins. Tous les quatre kilomètres est un point d’eau potable, non ceci pour les « campeurs », mais pour faciliter la tâche des résiniers qui, eux aussi, roulent à bicyclette Trois jours à bicyclette à travers les Landes, Paule Hutzler, Paris-soir du 5 septembre 1937..

Le 31 mars 1939, Albert Lebrun, Président de la République, décrète que l’État est autorisé à procéder à l’acquisition des terrains nécessaires à l’exécution des travaux et déclare d’utilité publique les travaux de construction de la route forestière duPilat à Biscarosse. Il charge le ministre de l’agriculture, Henri Queille, de son exécution J.O. du 17 avril 1939.. Des travaux – faits au titre des grands travaux contre le chômage – sont entrepris à la suite d’une décision de l’Administration en date du 20 octobre 1936. La main-d’œuvre est exclusivement composée de chômeurs Le personnel de maîtrise seul peut être recruté en dehors des chômeurs. recrutés par l’intermédiaire des Offices publics de placement. Environ 160 chômeurs sont employés au chantier ; une centaine habite La-Teste et Arcachon, les autres ont été recrutés à Bordeaux et dans les autres centres ouvriers du département.

Le point de départ choisi est l’aboutissement d’une route privée, appartenant à la Société Immobilière de Pilat-Plage, reliée elle-même au réseau départemental (route d’Arcachon à La-Teste et au Pilat). Cette route privée, dirigée sensiblement est-ouest, est actuellement sans issue. Le tracé y fait suite et part de son extrémité en se dirigeant vers le sud-est, faisant avec elle un angle de 100 degrés environ.

De là, il passe au village de La Grave, puis franchit une dune orientée est-ouest, en un point de passage obligé (sauf terrassements extrêmement importants) dit Col de Dulet Se situe au niveau du rond-point de la Dune. puis à Dulet même. L’orientation générale sud-est devient alors sud-ouest. L’arc ainsi formé éloigne le tracé de la Grande Dune du Sabloney à proximité de laquelle il serait imprudent de construire une voie de communication.

Le tracé, se dirigeant vers le sud-ouest, à travers une région vallonnée, aborde, en pente douce, la dune du Casino, orientée sensiblement nord-sud, qu’il est nécessaire de franchir pour atteindre la maison forestière des Gaillouneys.

La direction générale devient alors nord-sud. Le tracé, cheminant tantôt sur le flanc est, d’où l’on a une vue splendide sur la forêt usagère, tantôt sur le flanc ouest, d’où, en de nombreux points, on a de très belles échappées sur la dune du Sabloney et sur la mer, passe à une altitude de plus de 60 mètres, puis descend vers la maison forestière des Gaillouneys.

Plus loin, le tracé emprunte le garde-feu central, passe à l’est de la maison forestière de La Salie et, après un parcours extrêmement pittoresque de 13 kilomètres, rejoint la limite des Landes au garde-feu n° 8.

Dans le même temps, la municipalité de Biscarrosse s’active sur le tronçon partant de Biscarrosse-Plage ; ces 9 kilomètres restant à couvrir seront ouverts en 1941 Histoire des dunes maritimes de la Gascogne, Pierre Buffault, 1942..

Le 3 juillet 1939, on inaugure le nouveau service automobile touristique, créé par la Société Nationale des chemins de fer français, entre Arcachon et Biarritz, par la route de la Côte d’Argent, la forêt et les lacs landais.

Une caravane qui comprend des fonctionnaires de la S.N.C.F., des directeurs d’agences de voyages françaises et étrangères, quitte Arcachon le matin, à 7 heures, dans des cars très confortables, par le chemin de la Corniche, le Moulleau, Pyla, et poursuit sa route par les lacs de Cazaux, de Biscarrosse — (tête d’étape de la ligne aérienne – France-Amérique) — d’Aureilhan et Mimizan, de Léon, de Soustons et d’Hossegor, pour atteindre Bayonne et Biarritz Le Journal du 4 juillet 1939..

Au-delà, la route entre dans la forêt domaniale de La-Teste. Entre les garde-feu N° 20 et 18, où la vue est dégagée naturellement (jeunes pins) ou sera dégagée en plusieurs endroits pour ménager des points de vue, la mer apparaît à une distance d’environ 600 mètres.

Tableau indicatif des terrains en landes et pins

à acquérir sur la commune de La Teste-de-Buch (extrait)

Lieux-dits

Propriétaires inscrits à la matrice cadastrale

Propriétaires actuels ou présumés tels

La Grave

Mme Bordes (Charles-Adolphe), née Lesca (Marthe), à Paris idem

La Grave

Mme Fayet (Ulysee),

née Grouvel (Jeanne),

et Grouvel (Arnaud) à La Teste-de-Buch

idem

Cabot

Mme veuve Marsan (Hector-Bertrand), née Marsan, à Biscarrosse Marsan (Pierre), et Marsan (Marie), à Biscarrosse-Bourg

Petit Dulet et Hourn peyran

Daney (Armand) et (Pierre),

à Gujan-Mestras

Daney (Paul), à Gujan-Mestras ;

Mme veuve Daney (Armand), à Gujan-Mestras ; Mme Doche (Louis), née Daney (Marie), à Mont-de-Marsan ;

Mme Maysonnave (Gérard), née Daney (Simone), à Caudéran ;

et de Bellaing (Ernest), à Sicardens

Pessotte de Cabeils ou Cabeils

Bézian (Jean-Louis), à Gujan-Mestras idem

Bel Air

Cruchet (Prosper-Eugène), à Bordeaux idem

La Pointe du Sud

Mme Bacqueyrisses (Gabriel),

née Chagneau (Françoise), à Bordeaux

idem

Dunes de Grenelle ou le Gaillouneys

Bournaud (Jean-Alexandre), à Paris Bournaud (Yvonne),

et Bournaud (Raymonde), à Fontenay-sous-Bois

Dunes de Grenelle ou le Gaillouneys

Lacombe (Jean-Émile), à Paris idem

Dunes de Grenelle ou le Gaillouneys

Denorus (Léopold), à Bordeaux idem

Dunes de Grenelle ou le Gaillouneys

Bouyer (Fernand), à Château-d’Oléron idem

Dunes de Grenelle ou le Gaillouneys

Thébaux (Paul), à Bordeaux Mme Thébaux (Paul), née Beaumartin (Inès), à Bordeaux ;

Mme Ladeveze (Philippe), née Thebeaux (Andrée), à Bordeaux ;

Mme Morvan (Pierre), née Thebeaux (Isabelle), à Talence

Dunes de Grenelle ou le Gaillouneys

Léglise (Jean), à Arcachon idem

Dunes de Grenelle ou le Gaillouneys

Longau (Julien-Hubert), à Arcachon idem

Dunes de Grenelle ou le Gaillouneys

Cameleyre (Camille), et Fabre indivis, à Arcachon Cameleyre (Camille), à Arcachon,

et Fabre (René), à Arcachon

Dunes de Grenelle ou le Gaillouneys

Pollet (Georges), à Saint-Quentin Mme veuve Pollet (Georges), née Lepers, à Mulhouse ;

Pollet (Jacques), à Mulhouse ;

Mme Sauvage (Henri), née Pollet, à Boulogne-sur-Mer

Dunes de Grenelle ou le Gaillouneys

Levallois (Alphonse), à Paris idem

Dunes de Grenelle ou le Gaillouneys

Garcia (Louis), à Arcachon idem
D. des Gramuges

et du Désert

D. de Grenelle

Debray (Albert et Georges), à Paris Debray (Albert), et Debray (Georges), à Paris

Dunes de Grenelle ou les Déserts

Condou (Jean-Baptiste), à Goubern idem

La Gaillouneys ou Dunes de Grenelle et des Gramuges

Belliard (Jean), dit Mercier, à Biscarrosse idem

Les Déserts ou Dunes de Grenelle

Dubos (Jean-Baptiste), à Biscarrosse idem

Le Désert

Labat (Louis), à Biscarrosse idem
Dunes des

Gramuges

Duthu (Louis-Henri-Eugène-Célestin), à Arcachon idem

Les Déserts

Belliard (Arnaud), dit Batin, à Morticq idem

La Roquette

Darmuzey (Jean), à Parentis-en-Born Mme veuve Darmuzey (Maurice), à Bordeaux ; Mme Delay (Roger), née Darmuzey (Jeanne), à Toulon ;

Darmuzey (Jeanne-Marie) à Parentis-en-Born ; Mme Régis (André), née Darmuzey (Catherine), à Aix-en-Provence ;

Darmuzey (Jean), à Bordeaux

Le Père tranquille et l’expansion du Pyla

CH 8

INDEX

Ch.9 Pyla-sur-Mer, ce n’est plus…
comme avant !

Premier tome : La ville sous les pins, origines et développement
Un livre de Raphaël Vialard (publication limitée – commande par souscription)
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Sica et liaisons interquartiers

CH 10

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