Défense militaire du Pyla

CH 13

INDEX

Ch.14 Pyla-sur-Mer, ce n’est plus…
comme avant !

Premier tome : La ville sous les pins, origines et développement
Un livre de Raphaël Vialard (publication limitée – commande par souscription)
Commander le livre ou contacter l’auteur

Ch.14 Pyla-sur-Mer, ce n’est plus…
comme avant !

Premier tome : La ville sous les pins, origines et développement
Un livre de Raphaël Vialard (publication limitée – commande par souscription)
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 LA GUERRE ET L’APRÈS-GUERRE 

Durant la guerre, les constructions se ralentissent, même si les projets de lotissement font l’objet d’avis favorable de la part du Conseil municipal.

L’occupant réquisitionne hôtels et villas et installe une Kommandantur.

M. Spiès, directeur d’une société de gardiennage, veille sur les résidences pylataises à la demande des propriétaires.

Dès l’été 1939, M. Taffard, agent de police au Pyla, évoquait, dans un rapport, l’aide apportée par des employés privés du « Gardiennage de la Côte d’Argent » (en juillet, une délibération du Conseil municipal avait autorisé M. le Maire à passer un contrat avec cette société dirigée par M. Spiès ; auparavant, vers 1934, il était fait appel à des policiers municipaux d’autres collectivités – Tours en particulier – qui venaient prêter main forte durant l’été).

Fin 1940, l’adjoint du Pyla, Philippe de Rothschild, est déchu de la nationalité française et quitte le Conseil municipal.

Le nouveau Conseil, qui s’installe en avril 1941, ne compte plus d’adjoint à Pyla.

De nombreuses villas sont détruites par les Allemands et pas toujours reconstructibles.

Le Cabaret-des-Pins, établissement de style basque créé dans les années 1930 dans l’angle de la route de Pyla et des Abatilles, n’existe plus. Transformé en dépôt de munitions par les Allemands, il est détruit par ceux-ci, à leur départ, en août 1944.

Les terrains également sont endommagés : dans les années 1950, M. Debray, qui possède des terrains près de la maison forestière des Gaillouneys, n’a toujours pas été indemnisé au titre de dommages de guerre pour l’abattage de 6 000 arbres durant l’Occupation.

Malgré tout, il faut tourner la page :

Les premières « déréquisitions »interviennent en août 1945 : la première à en profiter est la villa Manhé (Mme L.), dans laquelle sont installés le poste de police et l’annexe de la mairie.

Le syndicat d’initiative demande rapidement à ce que soit enlevé tout le matériel militaire existant afin de pouvoir aménager la station pour l’été 1946 et que Pyla « redevienne la riante station d’autrefois ».

Beaucoup de travaux doivent être réalisés : enlèvement des barbelés parsemant les rues, destruction des murs bouchant les escaliers d’accès aux villas (Mur de l’Atlantique), réfection du perré, enlèvement des ouvrages anti chars et enlèvement des mines sur la route reliant La-Teste à Pyla.

Malgré tout, en 1971, une lettre de Françoise Lafon à Paul Euloge Paul Euloge (1915-1990) a été le premier président de l’Office des HLM de la Gironde du 16 septembre 1950 au 20 mai 1985. Dans les premières réalisations de l’Office des HLM en milieu rural, Paul Euloge a entretenu le respect d’un logement social en s’appuyant sur les besoins des locataires. Très apprécié par ses collaborateurs, il a également privilégié la construction de logements individuels avec jardin et garage dont les lotissements de Grangeneuve et de Cantelaude au Teich en sont l’illustration. Président fondateur des Sinistrés de la Gironde, ancien commissaire à la Reconstruction, ancien secrétaire général administratif du Mouvement de libération nationale, administrateur de la Société d’équipement de la Gironde, il se présente aux législatives de 1973 sous l’étiquette « Union de la Gauche démocrate et socialiste ». Il fut maire adjoint dans les municipalités « Ichard » et « Moga » à La-Teste. Le Conseil municipal du Teich, du 26 février 1997 décide de baptiser une rue à son nom ; elle dessert la deuxième tranche du lotissement de Grangeneuve en face du lotissement du Burgat. Source : À la découverte du Teich, Yves Petetin, 2009., adjoint aux travaux, souligne les « reliefs » de la guerre, toujours visibles dans certains endroits de Pyla.

 La Résistance

La résistance ne reste pas inactive.

En octobre 1940, plusieurs patriotes d’opinions très diverses prennent contact pour jeter les bases d’une organisation de Résistance. Les premières manifestations consistent en lacération des affiches ennemies, en confection et distribution de tracts anti-allemands.

Le groupement d’Arcachon a pour chef le colonel Édouard de Luze, propriétaire au Moulleau, et pour chef militaire le capitaine Robert Duchez Né en 1909 à Arcachon (fils de Georges Duchez, professeur au lycée Condorcet, qui devint à la Libération le propriétaire et directeur du « Journal d’Arcachon »), l’instituteur Robert Duchez restera dans l’armée après 1945, retraité avec le grade de lieutenant-colonel en 1963. Directeur du « Journal d’Arcachon », il fut aussi maire adjoint de la ville.  ; Mme Philbert les abritera dans sa villa Les Grenadiers, 26 avenue des Chênes. À ce titre, elle recevra, en 1947, la médaille de la reconnaissance française Journal d’Arcachon du 19 juillet 1947..

Une note émanant de l’Association Nationale des combattants d’Arcachon est transmise en janvier-février 1941 au préfet François Pierre-Alype par un député de la Gironde… à toutes fins utiles… comme l’écrira ce dernier.

Voici de quoi il en retourne :

L’assainissement moral du pays, sans lequel la révolution nationale ne serait qu’un vain mot, exige la dissociation et la mise hors d’état de nuire des forces qui, causes de nos malheurs, sont encore à la place qu’elles occupaient au moment de la défaite.

Ces éléments néfastes sont presque exclusivement ceux qui constituaient le front populaire : étrangers et nationaux (juifs, francs-maçons, communistes, etc.)

Mais les plus dangereux d’entre eux, parce que les mieux placés pour accomplir leur triste besogne, sont les fonctionnaires : enseignement, P.T.T., S.N.C.F., administrations diverses…

Les étrangers et communistes sont particulièrement surveillés.

L’entreprise G. serait, dit-on, une pépinière de communistes.

On cite notamment les noms suivants :

  • les deux frères G. : deux meneurs.
  • les deux frères C.
  • F. à Moulleau
  • J. dessinateur, serait communiste, à vérifier
  • Z. chef comptable ; douteux. Enquête à faire La Gironde sous l’occupation, Chroniques communales, Bassin d’Arcachon, Jacques Loiseau. http://www.ffi33.org/Biographies/bartette.htm.

 Dohse & Grandclément

J. Ph. Larrose : Je pense que le redoutable Dohse avait des ambitions politiques « .

Hubert de Beaufort : Politiques et financières car il menait grand train : il ne s’en cache pas et dans son interview avec Bergès en 1985, il parle avec nostalgie du champagne pris chaque matin, de ses maîtresses et de sa villa du Pyla Interview de J.Ph. Larrose par Hubert de Beaufort, témoin privilégié de l’occupation bordelaise et de la politique allemande à Paris..

André Marie Hubert Grandclément, fils de l’amiral Raoul Gaston Grandclément et d’Amélie de Barolet, fut à l’Action française puis au PSF (Parti Social Français).

Il tient un cabinet d’agent d’assurances, au 34 cours de Verdun, à Bordeaux.

Après l’armistice de 1940, il s’aligne sur la collaboration de l’État de Pétain. Mais comme l’écrit Miannay, quelques mois plus tard, André se ressaisit et entre en résistance. Il crée un petit groupe, France Vivra, et prend le pseudo Bernard.

Au printemps 1942, il est approché pour prendre la tête de l’OCM (Organisation Civile et Militaire) Sud-Ouest. Il accepte et en devient le délégué militaire pour sa région.

L’appartement du cours de Verdun devient un véritable salon où se retrouvent, pour parler de résistance entre amis : Roger Landes (opérateur radio de SCIENTIST), Jean Renaud-Dandicolle, Jouffrault père et fils, Charles Corbin, Roland Chazeau, Maleyran, Charles Haye, et les mauriciens Claude de Boucherville-Baissac C’est lui qui organisa l’important réseau de résistance SCIENTIST, dans le sud-ouest d’août 1942 à août 1943, et en Normandie de février 1944 à la Libération de la France. Son nom de code était Scientist. et sa sœur aînée Lise.

En juillet 1943, Christian Fossard, un des adjoints de Grandclément, est arrêté par le commissaire Poinsot, qui le livre à Friedrich Dohse, le chef de la Gestapo à Bordeaux. Fossard parle et livre notamment l’adresse du cours de Verdun où les Allemands découvrent le fichier des membres du réseau.

Arrêté, Grandclément est interrogé par Friedrich Dohse. Constatant son anticommunisme viscéral, Dohse propose à Grandclément un pacte : qu’il livre les dépôts d’armes, et ses hommes arrêtés seront libérés. L’accord est appliqué : des stocks d’armes sont livrés. Une centaine d’hommes sont libérés et des arrestations prévues sont annulées. Grandclément négocie avec Dohse la transformation de ses réseaux en « maquis blancs » destinés à lutter non plus contre les Allemands mais contre les communistes après le départ des troupes allemandes.

Des tractations ont lieu pour approcher le général de Gaulle, et proposer un traité ; celui-ci le refuse.

Depuis la mort de Georges Julien, alias Renaudin, le 29 juin 1944, Grandclément sait que ses jours sont comptés. Il se met sous la protection de Dohse, qui lui offre l’hospitalité dans sa villa au Pyla Serait située entre Meller et Chapelle (Souleyreau).où il séjourne avec sa femme Lucette Lucette Tartas qui a un fils Christian, né vers 1930 de son premier mari, Philippe Rigou. Grandclément a eu cinq enfants d’un premier mariage. sous le nom de Lefrançais.

Le 10 juillet 1944, Meirilhac, envoyé par le colonel Passy, qui voulait faire la lumière sur les circonstances de la mort de Claude Bonnier Mort, le 10 février 1944, au siège de la Gestapo au Bouscat par ingestion de cyanure quelques heures après son arrestation par les Allemands. alias Hypoténuse, découvre que Grandclément s’est mis à l’abri au Pyla Le Diable en rit encore : La Bicyclette Bleue (1944-1945), Régine Deforges, 1993..

Condamné par les messages de mise à mort de la BBC, envoyés depuis Bordeaux par Roger Landes, alias Aristide, agent du SOE (Special Opérations Executive), Grandclément rédige un long plaidoyer dans lequel il tente d’expliquer son comportement.

Après avoir déjoué la vigilance de la Gestapo, le 20 juillet, il tente d’obtenir un avion Lysander pour rejoindre Londres, afin de pouvoir se justifier devant le général de Gaulle.

Lors de son errance à travers la lande girondine, le couple Grandclément est rejoint par un authentique résistant de Biganos, Marc Duluguet. Très enthousiaste à l’idée de rejoindre Londres, Duluguet accepte de devenir le garde du corps de Grandclément. Finalement, après maintes péripéties, Grandclément, Lucette et Duluguet, tombent dans un piège tendu par Roger Landes et son équipe.

Interrogés par Roger Landes, dans la propriété de Franck Cazenave, près de Belin, les trois prisonniers sont emmenés sur le territoire de la commune de Saugnacq-et-Muret et abattus sur place, le 27 juillet 1944. André Bouillard se serait chargé de Grandclément, Roger Landes de Lucette, Christian Campet du jeune Duluguet, ce dernier totalement innocent Duluguet, membre du réseau Jade-Amicol, avait participé à plusieurs opérations de sabotage dans le département. à l’affaire.

Roger Landes, amoureux de Ginette Landes se marie, juste après la guerre, avec Ginette Corbin ; après son décès, il épouse, en 1990, Margaret Laing, qui lui survit avec un fils de son premier mariage. la fille de son adjoint Charles Corbin, dit Police, a-t-il voulu couvrir celui-ci de sa collusion avec la Gestapo ?

Il est clairement prouvé que Corbin a rencontré Dohse, en compagnie de Grandclément. L’a-t-il fait pour renseigner Roger Landes des intentions de la Gestapo Histoires extraordinaires de la Résistance française, 16 mai 2013. ?

 Le réveil pylatais

1948 est une année particulièrement active dans la reprise du développement de la station. Plusieurs voies sont dénommées pour faciliter les communications et la distribution du courrier. Ainsi naissent les avenues Haïtza, de Biscarrosse, des Dunes, de la Corniche et de la Forêt, mais aussi les avenues Eskualduna, Brémontier, des Tennis, de l’Observatoire, du Sabloney et des Sables.

En 1948, germe l’idée d’un corps de sapeurs-pompiers, M. Gaume ayant offert des tuyaux à la ville et proposé de garer une motopompe récupérée.

Les pompiers investissent le « garage Servira ensuite de local pour le club de kayaks ; est démoli en 2015 pour agrandir la salle polyvalente.« , 3 avenue des Chênes, appartenant à Louis Lignon. Il abrite une jeep et un half-track 4625 D

Le tourisme pylatais se transforme : on assiste à la naissance et au fleurissement des campings.

Le nombre d’élèves étant trop élevé pour les envoyer au Moulleau ou à La-Teste, M. Gaume offre, en 1948, une école à la ville ; celle-ci n’ouvrira qu’en 1950.

Les premiers élèves vont à l’école à l’hôtel de la Forêt, 193 boulevard de l’Océan (ancienne numérotation), loué à M. Bielsa. Les deux années suivantes, la classe a lieu à l’hôtel Seguin. À la rentrée 1953, c’est la villa de M. Périer qui héberge l’école.

Bien que le dossier soit près depuis 1951, la construction d’une véritable école – l’école Jacques Gaume – n’intervient qu’en 1956, près de la chapelle, même si certains sont partisans, depuis le début, d’une seconde école dans la partie la plus habitée du Pyla.

Les commerces se développent : ainsi, un débit de tabac ouvre en fin d’année, quartier Haïtza, le plus proche étant jusqu’alors au Moulleau, à 5 km de là.

Le développement de la section se fait parallèlement à celle de la station touristique : la municipalité autorise des commerçants ambulants à s’installer sur la plage. C’est ainsi qu’on trouve, entre autres, une buvette sur la plage de Pilat durant l’été 1946. Lors de la saison estivale 1948, des commerces proposent confiseries, boissons, bimbeloterie, articles de plage et autres, dans des installations mobiles en toile. La plage compte également un loueur d’appareils nautiques.

 Le Wharf

Il y a longtemps de cela, l’usine de Facture s’appelait la Cellulose du Pin et appartenait au groupe Saint-Gobain. Elle fabriquait du papier kraft et, pour ce faire, extrayait la cellulose des troncs de pin au préalable écorcés en les trempant dans des bains à base de soude ou d’autres produits chimiques tout aussi sympathiques. Quand les bains étaient renouvelés, les anciens étaient rejetés dans la Leyre qui les absorbait avant de les amener dans le Bassin. Les marées faisaient le reste.

Devant des quantités de plus en plus industrielles de ces rejets, devant les premiers soubresauts de l’écologie, il a bien fallu envisager un système pour protéger le Bassin de ces dangereux effluents.

Les premières études sur l’assainissement du Bassin ont été entreprises dès 1939, avec la création du groupement d’urbanisme du Bassin d’Arcachon. Ces études ont débouché sur un avant-projet en 1951, qui prévoyait la constitution de quatre groupements intercommunaux, rattachés chacun à une station d’épuration avec stérilisation des eaux (pour protéger la conchyliculture) avant leur rejet dans le Bassin :

  • Arcachon – La Teste-de-Buch
  • Biganos – Gujan-Mestras – Le Teich
  • Audenge – Lanton (moins Taussat)
  • Arès – Andernos-les-Bains – Lanton (Taussat)

Rien n’était prévu pour la presqu’île du Cap-Ferret dont le développement ne permettait pas, à l’époque, de présenter une étude valable.

Lorsqu’en 1963, les communes d’Arcachon, La Teste-de-Buch et Gujan-Mestras voulurent passer à l’exécution de ce projet, le principe du rejet d’effluents, même épurés, dans le Bassin d’Arcachon fut unanimement critiqué, comme n’offrant pas les garanties nécessaires de sécurité à tout rejet dans les eaux du Bassin, même après épuration.

Il s’ensuivit un second projet, plus ambitieux, qui reposait sur la création d’un collecteur général qui ceinture le Bassin d’Arcachon, capte les eaux usées des réseaux urbains traités en système séparatif et les eaux de la Cellulose du Pin, et d’un exutoire en mer.

Dans la zone de rejet, l’hydrographie, la courantologie, le comportement des effluents dans l’océan, en particulier leur dispersion et leur toxicité, firent l’objet d’études préalables menées par le Centre d’Études et de Recherches de Biologie et d’Océanographie Médicale (C.E.R.B.O.M.), et par le Laboratoire Central d’Hydraulique de France (L.C.H.F.). Ces études conduisirent à fixer le point de rejet à 5,5 km au large de la plage de La Salie ; ceci avec l’hypothèse d’effluents non épurés et d’un débit de 2 à 3 m3/s.

Les élus du Bassin d’Arcachon se mirent à courir le monde pour aller examiner de près tous les émissaires en mer que comptait la planète ; et d’aller au Japon, en Finlande, aux États-Unis, etc. tout cela bien sûr aux frais de la princesse.

La première phase des travaux d’assainissement du bassin d’Arcachon a duré de 1968 à 1970 sous la maîtrise d’ouvrage du S.I.A.C.R.I.B.A. Syndicat Intercommunal des Communes Riveraines du Bassin d’Arcachon créé le 23 juin 1964, sa vocation unique était la construction d’ouvrages intercommunaux devant permettre le rejet à l’océan d’eaux usées d’origines urbaines et industrielles collectées autour du Bassin d’Arcachon ; intégré au SIBA le 9 juillet 1973. (devenu S.I.B.A.). Elle consista à construire un réseau de canalisations de 1200 mm à 1500 mm de diamètre sur une distance de 30,5 km qui aboutit à La Salie. Le collecteur sud était fonctionnel en décembre 1970 et les effluents (débit 800 l.s-1) de l’usine de Facture étaient dès lors rejetés directement à l’océan le 4 janvier 1971 ; le Bassin d’Arcachon était enfin débarrassé de la pollution due aux eaux de papeteries : les effluents industriels sont rejetés du haut de la dune de la plage de la Salie, directement sur le sable, provoquant une étendue de mousse recouvrant les plages à perte de vue. Ces mousses malodorantes et nauséabondes ne tardèrent pas à déclencher de vives réactions et devint également pour quelques temps un but de… promenade dominicale.

En juin 1971, un émissaire provisoire de 400 m est mis en service

La seconde phase fut confiée à l’entreprise allemande Harmstorf La famille Harmstorf a écrit une longue page de l’histoire des travaux sous-marins. En 1870, Friedrich Matthias Harmstorf fut le premier plongeur à explorer l’Elbe près de Hambourg. Son fils Alnwick, également plongeur, mit au point en 1926 une technique d’enfouissage de câbles dans les fonds marins basée sur l’utilisation d’injecteurs d’eau sous pression. Le petit-fils, Rudolf Harmstorf, jeune ingénieur hydraulicien, passionné de voile – il a participé aux Jeux olympiques – et inventeur de diverses techniques de forage sous-marins, de caissons de plage, de procédés d’enfouissement conduit un énorme chantier à Anchorage, en mer du Nord, et a déjà travaillé en France. C’est surtout son « Chariot » qui séduit : un engin intelligent présenté dans une brochure qui fait alors le tour des réunions municipales, départementales, syndicales et de la bonne société. : elle devait poser, en partant de l’extrémité de l’émissaire jusqu’à 5,5 km au large, une canalisation plastique de 1200 mm de diamètre, enfouie par des fonds de 25 à 30m, terminée par un diffuseur de 250 mètres de long.

C’est le projet qui nous a été vendu, à nous les citoyens.

La société apporta force barges gigantesques à quelques brasses du bord de mer de la Salie et se mit au travail. Elle choisit de commencer par placer le tuyau en commençant au large. Pour cela elle utilisait une énorme charrue – « Le Chariot » (approximativement 6 m par 12 m pour 6 m de hauteur) – qui creusait, sous la mer, un sillon dans lequel on plaçait le tuyau en plastique noir. Les tuyaux assemblés sur la barge sont amenés à l’engin qui creuse, par injection d’eau sous pression, une étroite et profonde tranchée, enfouit et recouvre le tuyau, avec 2 mètres de couverture de sable, à l’aide de vibreurs.

On découvrit bien vite qu’aux termes du contrat qui nous liait à l’entreprise, celle-ci ne travaillerait que les jours de beau temps et aurait droit à un dédommagement pour chaque jour de mauvais temps. Et la première année, les jours de beau temps furent particulièrement rares (on ne sait pas qui décidait qu’un jour dit était de beau ou mauvais temps). Si bien qu’il fallut une bonne année pour enterrer les 3,6 kilomètres de tuyau en plastique. Quand cette opération fut terminée, il y eut une grande tempête. Les barges dérapèrent sur leurs ancres sans gros dégâts, mais quand le calme fut revenu, il fut absolument impossible de retrouver ne serait-ce qu’un seul bout du tuyau enterré. Et ce n’est pas faute d’avoir cherché. Tout le travail était perdu.

Les difficultés Au moins 4 graves accidents de plongée eurent lieu durant le chantier, 2 furent fatals dues à la présence de la houle, ralentirent le chantier : il ne put être terminé dans le délai prévu. Deux diffuseurs furent l’un cassé et l’autre emporté par la tempête de novembre 1971. Une longue portion du dit tuyau se promena entre deux eaux, faisant croire à quelques marins mal réveillés que le Grand Serpent de Mer du Bassin d’Arcachon venait pour régler des comptes Françoise Branger.

Un jour, un télex tomba à la mairie d’Arcachon : Harmstorf avait déposé son bilan en laissant tout en plan En 1972, à quelques mois de la fin des travaux, l’entreprise allemande est mise en faillite à la suite de lourdes pertes financières sur un chantier à Anchorage en Alaska dû à la dévaluation du dollar et celui de Brême lui coûte les yeux de la tête avec la réévaluation du mark. La compagnie put reprendre ses activités dès 1975. Elle rencontra la réussite dans de nombreuses régions du monde jusqu’en 1992, date de sa vente à British Telecom / Cable & Wireless.. Cela n’allait pas déstabiliser nos Conseillers spécialistes « ès émissaires » qui prirent tout de suite les mesures conservatoires qui s’imposaient. Ils firent saisir tout le matériel abandonné par la société pour essayer de récupérer une partie de l’argent ainsi gaspillé. Las, tout le matériel était en leasing et fut récupéré Les engins de chantier ont été vendus aux enchères en 1976 à une société espagnole. par la société financière qui l’avait loué ; sauf « Le Chariot » Il se trouve dans l’axe du wharf, à environ 3 km au large et 30 mètres de fond. Coordonnées : 44°30.536’N, 01°17.329’O. Tant et si bien que lors de la saison touristique suivante, le tuyau en plastique qui sortait de la forêt était supporté pendant 30 ou 40 mètres en mer par des poteaux provisoires en bois. Le tuyau dégorgeait ainsi ses horreurs jour et nuit au bord de la plage dans une bonne odeur de mercaptans. Alors que ces effluents se dissolvaient sans faire d’histoire dans l’eau douce de la Leyre, ils se mirent à émulsionner quand ils étaient ainsi rejetés sans précaution dans l’eau salée. Bonjour le spectacle.

Devant la colère du peuple, un ministre, je ne sais plus lequel, vint se jeter à l’eau, trois minutes, devant force caméras au pied dudit tuyau pour montrer qu’il n’y avait aucun danger pour la population locale. Il n’y avait pas besoin de cette démonstration pour prouver que décidément dans notre pays les hommes politiques sont prêts à tout pour conserver leur poste.

Le maître d’ouvrage fit face à cette situation malheureuse : il réalisa, aux frais de la Cellulose du Pin, une seconde canalisation provisoire composée d’un tuyau acier Ø 800 mm, fixé sur une estacade en bois, construite au-delà de la laisse de basse mer.

La saison finie, il fallut reprendre le problème à la base : la tentative de pose d’une canalisation sur le fond s’étant soldée par un échec, une canalisation sur estacade est proposée.

On fit un nouvel appel d’offre qui se matérialisa par la construction d’un « wharf ». Deux projets concurrents furent présentés. En définitive, le projet « Briard » fut jugé plus « joli » touristiquement parlant.

L’adjudicataire, l’Entreprise Gem-Hersent fut désignée en janvier 1973.

L’ouvrage, entièrement métallique, a une longueur totale de 792 m entre l’axe de la culée de départ et l’axe de la palée terminale. Les travées prennent appui tous les 36 m sur des palées métalliques composées de tubes de 1 m de diamètre environ.

Les palées courantes, composées de 2 tubes, sont inclinées dans le sens transversal pour reprendre les efforts dus au vent et à la composante transversale de la houle.

Les palées d’arrêt implantées au centre de chaque élément, composées de quatre tubes, sont inclinées et placées dans deux plans perpendiculaires. Les tubes orientés dans l’axe de l’ouvrage s’opposent aux effets de la houle longitudinale ; les tubes perpendiculaires à l’axe s’opposent aux efforts transversaux. Les quatre tubes sont réunis en tête par un chevêtre.

La palée terminale, composée elle aussi de quatre tubes, est complétée, côté large, par un tube supplémentaire de 1200 mm incliné et orienté suivant l’axe de l’ouvrage. Il évacue les effluents par deux diaphragmes latéraux de 450 mm de diamètre.

Dans les zones soumises à l’érosion, les pieux des palées sont protégés à leur pied par des viroles métalliques de 5 m de hauteur, de 10 mm d’épaisseur et concentriques au pieu.

La superstructure, entièrement métallique, est composée d’un tube de 1500 mm de diamètre. Ce tube est surmonté d’une passerelle de 3 m de large placée au-dessus des plus hautes vagues.

Les Chantiers Modernes ont réalisé les premiers travaux terrestres (accès au chantier, plate-forme pour les installations, constructions de la culée, etc.). Les palées 1 à 4 ont été exécutées de la plage avec des moyens terrestres traditionnels : le fonçage des pieux était réalisé par un procédé mis en œuvre par Soletanche (circulation inverse : une pompe Toyo descendue à l’intérieur du pieu désagrège le terrain et refoule l’eau chargée de sédiments par l’intérieur du pieu à l’extérieur) ; les derniers mètres sont vibrofoncés.

Les 22 travées métalliques de 36 m de long, pesant 40 t, ont été préfabriquées par C.F.E.M. dans son usine de Blanc-Misseron et acheminées par fer jusqu’à Cazaux, et par convoi exceptionnel routier sur le chantier.

Les palées 5 à 22 ont été mises en place par l’Entreprise Gem-Hersent, avec la plate-forme autoélévatrice GEM 161 ; avec le concours de Soletanche pour le fonçage des pieux.

Les 7 premières travées de 36 m ont été lancées par l’Entreprise C.F.E.M. depuis la terre (avec un avant bec).

Le procédé de construction au-delà de la palée 7 était le suivant :

  • sur la partie d’ouvrage déjà réalisée, on acheminait les éléments de palée (pieux, chevêtres) et la travée jusqu’à la plate-forme où ils étaient chargés par une grue de 100 t Lima 2400 ;
  • la plate-forme autoélévatrice se mettait en flottaison, se déplaçait sur ses ancres et s’auto-élevait au niveau de la palée suivante ;
  • le gabarit de guidage et lançage des pieux était réglé.

Les pieux étaient mis en fiche et remplis de sable. Le chevêtre était soudé après l’enlèvement du gabarit de guidage et la mise en place des viroles. La travée transportée par la barge était soudée sur la travée précédente et le chevêtre.

La barge pouvait être alors à nouveau alimentée avec les éléments du tronçon suivant, et le cycle dont la durée minimale était de trois jours, se répétait.

Les opérations sont plus faciles à décrire qu’à exécuter, la manutention et la soudure des travées ne pouvant se faire qu’en l’absence de vent. À ces difficultés dues au vent et à la houle s’ajoutait celle du terrain : le fonçage des pieux n’était pas facile et diverses techniques ou leur combinaison furent expérimentées. Les pieux furent équipés, à leur pied, d’une sorte de sabot ce qui permit de réduire les fiches prévues d’environ moitié Inspiré des études théoriques menées par M. Daniel Martin, Ingénieur TP à E.D.F..

Le marché était entièrement forfaitaire ; le coût de l’ouvrage s’éleva à 19 000 000 F.

La mise en service eut lieu en mars 1974.

À quelques jours de son inauguration, je ne sais plus si c’était avant ou après, une plateforme pétrolière rompt ses amarres dans le Golfe de Gascogne. Elle se met à dériver en se dirigeant dangereusement vers l’extrémité de ce wharf tout neuf. Il s’en fallut d’un cheveu qu’elle ne l’emporta.

Une fois le wharf construit, on abandonna l’idée de le prolonger d’un tuyau enterré ; où l’on ne trouva pas l’argent pour le faire Jean-Pierre Ardoin Saint Amand. !

Dans les premières années de son exploitation, la mer gagna sur la côte et il fallut enrocher le début du wharf pour le défendre contre les vagues. Puis la mer changea d’avis et se mit à reculer. Aujourd’hui, il n’y a plus que la moitié du wharf qui est en mer à marée basse.

À partir du mois d’octobre 1975, les premières amorces des réseaux urbains sont branchées ; il est prévu la construction de stations d’épuration primaire Réalisationde l’émissaire de La Salieau sud d’Arcachon, J.-M. Barbier, La Houille Blanche, n° 7/8, 1975..

On est loin du Cahier des charges de la « Station climatérique et balnéaire de l’Éden de la Côte d’Argent (dune de Pissens) et, éventuellement, de la plage de Pilat », qui précisait que tout local susceptible d’être habité de façon continue ou simplement intermittente ou accidentelle, sera pourvu soit à l’intérieur, soit à l’extérieur, de lieux d’aisances avec fosse voûtée, étanche et imperméable, ayant au moins deux mètres de hauteur sous clef. Que chaque fosse d’aisance sera munie de deux tuyaux de ventilation qui s’élèveront au-dessus des toits à des hauteurs différentes. Les tuyaux des lieux devront être imperméables et étanches ; ils ne pourront être encastrés dans les murs. Les eaux ménagères doivent être recueillies dans des puisards imperméables.

Le sol des écuries, les rigoles communiquant avec les fosses à fumier ou à purin seront, comme les fosses elles-mêmes, imperméables et étanches.

Et, comme en 1925, de celui du Cahier des charges du lotissement de Pyla-sur-Mer qui prévoit, dans ses articles 8 & 9, que lorsqu’il n’existera pas d’égouts, les eaux pluviales provenant des habitations pourront être déversées dans les caniveaux des voies, à la condition de traverser les trottoirs dans des gargouilles en fonte installées et entretenues par l’acquéreur et à ses frais.

Les fosses d’aisance seront fixes, étanches et construites conformes aux règlements.

Il pressent toutefois qu’à partir du moment où des tuyaux ou égouts seront installés, les acquéreurs devront, à leurs frais, amener leurs eaux pluviales et ménagères dans ces canalisations au moyen d’un branchement souterrain et étanche.

Aujourd’hui, un collecteur de 65 km transporte vers ce wharf les effluents des communes du Bassin qui sont traités par 4 stations d’épuration.

Bien sûr, tous les effluents qui sortent de son tuyau, et qui ne proviennent plus que de la seule usine de Facture mais de toutes les communes riveraines, sont parfaitement traités et sans danger aucun pour la santé publique, cela fait je ne sais pas combien d’années qu’on nous le répète. Quoi qu’il en soit, il y a quelque temps sont apparues des pancartes interdisant de ramasser des coquillages …

Des coquillages à l’océan, il n’y en a jamais eu des masses. La baignade par contre est parfaitement autorisée au mépris du sacro-saint principe de précaution Jean-Pierre Ardoin Saint Amand.. Les usagers locaux du littoral constatent régulièrement les effets de cette pollution sur les plages: eaux noirâtres, mousses marron; odeurs nauséabondes : on note une importante nappe blanche, le 11 octobre 2012 ; deux surfeurs ont dû rejoindre la plage en raison de multiples démangeaisons et d’une forte irritation des yeux.

À plusieurs reprises, Surfrider a attribué des Pavillons Noirs à la Plage de La Salie Sud pour protester contre les rejets du Wharf. Le panache émis par le wharf, à marée descendante, va jusqu’à Biscarrosse et se répand dans les passes du Bassin d’Arcachon, à hauteur du Banc d’Arguin, et au-delà à marée montante Gardiens de la côte, René Capo, président du Comité de Vigilance de Biscarosse. René Capo à été coordinateur du comité de vigilance de Biscarrosse depuis sa création en 2001 jusqu’en 2014 ainsi que du collectif Aquitain contre les rejets en mer (2005-2006). Il est également l’un des membres fondateurs de l’Association pour la Défense, la Recherche et les Études Marines de la Côte d’Aquitaine (ADREMCA) en 1979..

Le SIBA a lancé des études permettant d’envisager de nouvelles alternatives aux rejets en mer.

Le traineau d’ensouillage, autrement dit « Le Chariot », fait aujourd’hui le bonheur des plongeurs et des pêcheurs plaisanciers.

Je vous livre un pangramme :

Voyez le brick géant que j’examine près du wharf.

 Et après ?

Nous venons d’effectuer une approche globale du Pyla.

Dans l’ouvrage qui va suivre, nous vous proposerons de visiter quelques lieux emblématiques, et de s’intéresser à l’évolution d’activités ludiques ou commerciales.

Défense militaire du Pyla

CH 13

INDEX

Ch.14 Pyla-sur-Mer, ce n’est plus…
comme avant !

Premier tome : La ville sous les pins, origines et développement
Un livre de Raphaël Vialard (publication limitée – commande par souscription)
Commander le livre ou contacter l’auteur

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